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Les Contes du Colvert
27 octobre 2020

LA TERRE.

LES LEGENDES DU COLVERT

 

 

Par Stéphane BERTRAND

 

 

Les légendes du Colvert défient le temps.

Ecoute! Elles nous arrivent avec le vent.

 

 

 

 

N° L15

 

LA TERRE.

 

Cette légende nous vient du fin fond des temps. Elle est donc née il y a si longtemps que nous ne pouvons que nous réjouir d'en avoir eue connaissance car elle date de l'époque lointaine à laquelle la terre était encore plate. Plate comme un immense tapis rectangulaire, épaisse de quelques kilomètres et bordée du néant sur ses quatre côtés. Contrairement à aujourd'hui, et en théorie, si l'on se dirige vers n'importe quel point cardinal et respectant la direction, tôt ou tard on se retrouvera chez soi. Mais dans le temps qui nous intéresse ici, sur une terre toute plate, il fallait impérativement faire demi-tour pour revenir à l'endroit duquel on était parti sous peine de chuter dans le vide abyssal, le néant, d'un côté ou de l'autre. Ceux qui avaient leur jardin en bordure de la terre et jetaient leurs ordures par dessus leur barrière, devaient orner leur entrée d'un panneau "Sens Interdit" et avaient obligation de surveiller de près leurs enfants dès que ceux-ci commençaient à marcher.

 

Les routes, toutes droites semblaient, à ces époques-là infinies, pour tout voyageur, marchand ou pèlerin qui souhaitait se déplacer. En rebroussant chemin à un bord ou l'autre  tous se retrouvaient dans des contrées déjà parcourues. Pas question du perpétuel "en avant" pour découvrir de nouveaux horizons. Les églises, les temples étaient innombrables le long de la route centrale où se croisaient de millions de gens de toutes origines, religieux à pieds, commerçants à dos de chameaux, soldats à cheval. Ces derniers, personne ne pouvait confirmer qu'ils attaquaient ou battaient en retraite! Et plus loin toujours le plat, pas la moindre colline, quant à une éventuelle montagne, n'en parlons même pas! Pas de sommets enneigés, pas de lacs ni mers, pas de saisons. Pour boire il fallait stocker l'eau de pluie, comme pour se laver, pour se sécher et se chauffer on attendait le soleil, moins facile à conserver qu'un liquide et pour se reposer ni auberge ni hôtel. Un tapis de sol faisait l'affaire. Plat comme la terre. Il y faisait jour ou nuit pour tous en même temps et le décalage horaire entre différentes communautés était inexistant. La terre elle, telle une moquette de couloir, ne permettait aucune fantaisie et pas question d'en faire le tour même en seulement quatre vingt jours!

 

Les dieux qui régentaient alors tout sur cette terre, lorsqu'ils en avaient assez des bêtises des hommes qui l'habitaient, prenaient alors cette terre par deux coins et la secouaient dans le vide pour faire place nette. Comme nous aujourd'hui avec une nappe pour la débarrasser des miettes de pain survivantes au dernier repas ou comme un drap de lit le matin pour évacuer toutes les mauvaises odeurs de la nuit! Et plus tard, à nouveau tendue, cette terre redonnait vie à toute sorte d'espèces comme  elle le fait toujours. Dame Nature ne dira jamais son dernier mot!

 

Arriva le jour où la vie sur terre devint infernale à tel point - les hommes l'avaient polluée de toute part, n'arrêtaient pas de s'entretuer pour des questions d'intérêt ou de croyances, de couleur de peau, pour le refus d'un simple sous ou d'un petit bout de pain - que les dieux entrèrent dans une terrible colère et tous ensemble prirent la terre en mains pour la froisser comme une vulgaire feuille de papier, en faire une boule et la  jeter dans un coin du cosmos. Et là, elle se mit à tourner sur elle-même! Ils appelèrent cette rage le "big-bang"! Et une fois leur colère passée, ces dieux se retirèrent loin de la terre, là-haut sur l'Olympe et ne donnèrent plus aucun signe de leur existence. Abonnés absents!

 

Alors commença une autre histoire! Pour les hommes! Franchir un col verglacé à trois mille mètres d'altitude, traverser un plan d'eau dont la rive d'en face se confond avec l'horizon - tiens, l'horizon en voilà encore une chose inconnue -  labourer la terre en pente, parfois à pic, pêcher la truite dans un ruisseau d'eau vive - c'est quoi cette bestiole qui frétille et vous glisse des mains - s'élever dans les airs pour avoir une vue d'ensemble, aller à la conquête d'autres mondes et d'autres gens; creuser la terre en profondeur sans parvenir à son foyer central, mais pour trouver l'or noir ou découvrir une grotte dont les murs étaient recouverts de graffitis genre "Street-Art"!  Et le noir qui arrive après la lumière, progressivement et pas pour tous en même temps, le froid qui remplace la chaleur, les virages des chemins, etc. Quel tournis! Un million de nouveaux problèmes à résoudre! Mais comment ? Tout restait à inventer!

 

Certains hommes qui avaient survécu, par miracle, au "big-bang" ne comprenaient pas ce qui s'était produit et pourquoi leurs aïeuls  se plaignaient, dans le temps, de la platitude de la terre qui elle, semblait parfaitement assumer, sa nouvelle "rondité".  De nouvelles légendes allaient naître mélangeant au fil des siècles le plat et le rond. Chevaliers de la table ronde armés d'épées plates, Mongols bataillant dans des steppes plates et sans fin mais habitaient dans des yourtes rondes, "Toros" dans des "plazzas" rondes, aéronefs ronds s'élançant sur une piste plate très longue, serviettes de table présentées à plat sur l'assiette plate puis rangées dans des ronds... Jouer à la marelle sur un terrain plat puis y faire une ronde, composer sur des lignes plates parallèles avec des rondes, ventres plats ou ronds, tourner en rond mais s'allonger à plat, faire des rondes de nuit sur un rempart crénelé au chemin de ronde bien plat...

 

Tout restait à découvrir, les montagnes, les cours d'eau, du plus mince au fleuve le plus large, construire en hauteur pour un gain de place et un revenu par m² multiplié par le nombre d'étages, les sports d'hiver et d'été, utiliser la terre avec parcimonie, (cette idée s'est fait jour longtemps après, malheureusement), ne pas dormir tous ensemble, ou travailler à la lumière du jour et à tour de rôle, inventer des moyens de transport pour se jouer des obstacles naturels et apprendre à faire "le tour de la terre" et du monde par la même occasion! Enfin, à cette époque, nos ancêtres avaient bien du mérite car résoudre un problème sans que le suivant pointe son nez aussitôt, ne s'est jamais vu. Ni au début de notre boule bleue ni encore aujourd'hui, pas plus que demain!

 

 

 

 

 

PLATITUDE ET RONDS DE JAMBES,

L'APANAGE DES COURTISANS EN CHAMBRE!

 

MUSEAU PLAT ET CUL BIEN ROND,

EN VOILA UN BEAU COCHON!

 

PIECES RONDES ET BILLETS PLATS,

L'ARGENT VIENT ET VA!

 

 

 

 

Le Colvert, septembre 2019.

© Stéphane Bertrand.

 

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  • Les Contes du Colvert racontent de belles histoires aux enfants jeunes et moins jeunes que l'on peut leur lire le soir avant de s'endormir car: "Les canards comme les paroles s'envolent. Seul les contes du colvert résistent au temps."
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