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Les Contes du Colvert
25 avril 2021

LES DEUX LUTINS.

 

                       

LES LEGENDES DU COLVERT

 

 

Par Stéphane BERTRAND

 

 

Les légendes du Colvert défient le temps.

Ecoute! Elles nous arrivent avec le vent.

 

 

 

 

N° L 21

 

 

LES DEUX LUTINS.

 

 

Il y a des millions d'années, avant que la terre ne devienne plate alors qu'elle était encore ovale comme un ballon de rugby avant de revenir à sa forme ronde, un couple de lutins, jeunes et encore innocents des choses de la vie, en visitant l'installation centrale de la régie de la terre avait, "pour s'amuser", enfoncé le bouton  "Stop" de l'attraction terrestre. Une seconde d'inattention du guide qui allait lui coûter cher, et pas seulement à lui... Et bouleverser le monde!

 

En quelques minutes tout ce qui dépassait de la croûte de la planète, à moins d'être profondément enterré, disparut de sa surface. Les humains et les animaux furent les premières victimes et s'élevèrent vers le ciel dans une immense spirale aspirante pour être rejetés, éparpillés par-ci par-là, dans l'univers sans fin et sans vie. Les habitations éphémères des hommes nomades d'alors suivirent assez rapidement, puis vinrent  toutes les  plantations récentes. Les arbres centenaires furent les derniers à s'élever dignement vers une destination inconnue.

 

C'est à ce moment-là que se présenta la dernière chance de survie pour notre couple de lutins qui lâchèrent un des grands sapins qui vacillait encore sur sa "rampe de lancement" avant de disparaître. Agiles et rapides ils se glissèrent dans le tunnel laissé par une grosse racine, rebouchèrent avec d'infinies précautions le trou, se tenant l'un l'autre à tour de rôle et se retrouvèrent  seuls et dans le noir, dans un immense labyrinthe de galeries souterraines.

 

L'obscurité qui les enveloppait aidée par l'énorme frayeur qu'ils avaient vécue fit que, pelotonnés l'un contre l'autre, ils s'endormirent très vite sans mesurer la chance qu'ils avaient de ne pas être, à ce moment précis, en train de pénétrer dans les abysses de l'infini, sans aucune chance de retour.

 

Bien plus tard ils se réveillèrent reposés et affamés. Une petite lueur semblait filtrer à travers les mottes de terre qui obstruaient la galerie de l'interieur dans laquelle ils se trouvaient. Puis ces amas de terre se mirent à bouger et bientôt ils purent entrevoir les pinces d'un gros scarabée noir venant en leur direction. Ils eurent à nouveau très peur et se mirent à trembler et à pleurer. Et si cette bête vivante dans les entrailles de la terre les prenait pour une proie bonne à déguster ?

 

"N'ayez pas peur, les petits," dit le gros monstre, " je ne vous veux aucun mal, bien au contraire! Je ne suis que l'avant garde, chargé de déblayer la route du cortège de la bonne "Fée des Ombres" et d'éclairer sa route."  A peine ces paroles prononcées, des lampadaires firent leur apparition tous les cinq mètres en transformant cette galerie sombre en avenue bien illuminée. Les deux lutins se tenaient par la main admirant cette prouesse magique mais leur estomac se fit bruyant tant leur besoin de manger était grand. Avec une de ses pinces le scarabée, qui avait parfaitement compris ces messages de gargouillis et borborygmes, dégagea une partie de la paroi pour faire apparaître une jolie auberge. Devant la porte une stagiaire-fée leur fit signe d'entrer et les conduisit à une table richement garnie des mets les plus délicats et délicieux à la fois.

 

"Mangeons pour nous donner des forces," dit le jeune lutin à sa compagne, "Nous verrons plus tard ce qui nous arrivera !" Et tous deux se mirent à table, salivant des papilles après avoir commencé à dévorer les plats avec leurs yeux.

 

Puis la "Fée des Ombres" fit son entrée dans le restaurant et s'assit, en toute simplicité, à leur table. Elle interrogea les lutins : "Mais comment avez vous fait pour échapper à la terrible catastrophe qui s'est produite à la surface ?

 

Alors ils racontèrent à la fée leur chance d'avoir pu s'accrocher à une petite racine avant que l'arbre ne soit emporté vers le ciel, le néant, et comment ils avaient survécu à l'éboulement laissé par une racine plus grosse. Ils conclurent: "Et nous voici après avoir rencontré votre scarabée!" Mais pas un mot de leur bêtise!

 

La fée, qui n'était pas dupe et avait le sens de la double vue, sourit et très gentiment leur rappella leur faute de jeunesse, leur imprudence due à leur jeune âge.  " Mais pour nous qui vivons sous la terre ce n'est pas bien grave, au contraire. Nous n'aurons plus peur de l'humain qui retourne, bêche sa terre en ignorant tout ce qui se passe en dessous et démolit par son geste parfois une ville entière construite par le peuple de l'ombre. Nous n'aurons plus à fuir les coups de pelle, leurs sondages souterrains pour savoir ce qui se passe sous leurs pieds et la pose de gros tuyaux mal venus surtout à cause de leur odeur nauséabonde; pas plus des  trous faits par des piquets de clôture qui arrivent parfois sans crier gare au milieu de nos habitations tuant des milliers d'œufs  ou de larves prématurées dans les maternités de nos hôpitaux. C'est, finalement très bien ce que vous avez fait, et comme il nous fallait un couple régnant, nous allons vous préparer à votre future tâche tout en sachant que vous êtes maintenant devenus nos bienfaiteurs. Merci !"

 

Le monde du silence souterrain s'était réuni en congrès. Il y avait là tous ceux qui se déplaçaient, les immobiles vivant à l'extrémité d'une racine  comme un nouveau-né s'accroche à son biberon, les invisibles ayant pris forme aux yeux des participants, les plus gros et les infiniment petits, à carapace ou nu et même ceux qui s'enterraient quand il faisait trop froid là-haut et avaient prolongé leur séjour. Désormais il leur faudra adopter une vie souterraine. Parmi les plus heureux, les truffes, ces champignons au goût prononcé, qui pourront se développer à l'aise loin des chiens ou porcs renifleurs et les vers de terre n'ayant plus à redouter une patte de poulet pour les déterrer ni un pêcheur qui leur promettait une fin de vie désagréable accroché à un hameçon à se tortiller de douleur avant de finir dans le ventre d'un poisson glouton.

 

C'est sous des applaudissements nourris lors d'une "standing ovation*" que nos deux lutins furent élus reine et roi du monde le plus discret, le plus caché, à la fois près et loin de la surface de la terre qui maintenant, ayant perdu son pouvoir de retenir à sa surface qui et quoi que ce soit, virevoltait sans retenue, au fond infini de l'univers et du cosmos. Au risque, dans sa danse folle, de heurter une autre planète et de produire encore un "Big Bang!"**

 

 

 

 

LES GRANDS HEURTS SOUVENT SONT DOULOUREUX,

MAIS APPORTENT PARFOIS AUSSI DES EVENEMENTS HEUREUX.

ILS CHANGENT LE MONDE ET FONT DES PEUREUX

MEME SI LE BOULVERSEMENT N'EST FAIT QUE DE PEU !

 

 

°°°°°°°°°°

 

 

 

 

* "Standing ovation", (langue anglaise), c'est le moment où, à la fin d'un spectacle, les spectateurs se lèvent pour applaudir debout les artistes sur scène.

 

 

** "Big Bang", (anglais aussi),  c'est une théorie "savante" qui tente d'expliquer que tout l'univers est apparu après un grand choc cosmique il y a plus de 17 milliards d'années ! Pour plus d'infos, lisez ou relisez, "la relativité générale"  d'Albert Einstein!

 

 

 

Le Colvert, Baudienville, janvier 2020.

© Stéphane Bertrand / Mai 2020.

 

 

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  • Les Contes du Colvert racontent de belles histoires aux enfants jeunes et moins jeunes que l'on peut leur lire le soir avant de s'endormir car: "Les canards comme les paroles s'envolent. Seul les contes du colvert résistent au temps."
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