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Les Contes du Colvert
24 novembre 2015

CROCQ, UN CROCODILE PAS SI MALIN !

CROCQ , LE CROCODILE PAS SI MALIN.

 

 

Le fleuve, très large, roulait lentement ses eaux boueuses d'une couleur ocre, entre, tantôt une forêt tropicale très dense, tantôt des rives sablonneuses dorées.

Crocq vivait là avec sa tribu. Ses journées étaient partagées entre des séjours dans l'eau du fleuve et des siestes longues au soleil sur le sable. Deux ou trois fois par semaine il chassait pour se nourrir. Dans les eaux brunâtres les poissons se faisaient rares, il devait donc s'éloigner des siens pour tenter sa chance, plus loin, dans des eaux plus pures. Mais Crocq préférait rester caché dans l'eau tout près de la berge, immobile, en attendant qu'une proie facile se présente. Seuls ses yeux et ses narines étaient visibles à la surface et se confondaient avec l'environnement un peu glauque. A l'heure où les animaux de la steppe vont boire Crocq se faisait plus attentif. Là, une gazelle s'était avancée imprudemment dans l'eau pour s'abreuver et hop, sa gueule aux terribles dents acérées grande ouverte, telle une flèche, Crocq et ses amis crocodiles se précipitaient. Les mâchoires se refermaient sans pitié sur la tète du springbok qui était en quelques secondes entrainé au fond de l'eau pour être dévoré. Pas difficiles, ces grands reptiles mangeaient tout ce qui se laissait attraper, oiseaux, rats ou serpents, et à plusieurs, un zèbre ou un gnou ne leur faisait pas peur.

Puis, une fois la proie engloutie et la plage débarrassée de tous ces assoiffés, Crocq  et les autres se couchaient sur le sable chaud pour digérer. Souvent la gueule grande ouverte afin que les petits oiseaux, qui vivaient aux alentours, mais  trop petits pour faire une proie de caïman, puissent leur nettoyer les dents des restes du repas tout en faisant le leur.

Mais un jour de grande faim la voracité de Crocq lui joua un mauvais tour. Il n'avait pas mangé depuis quelque temps quand il vit passer pas très loin une très grosse et imposante tortue. Hum, se dit Crocq, en voilà un bon repas qui va calmer mon envie de manger pendant quelques jours. Et Crocq se mit en chasse. Tout doucement, sans remuer la vase et en faisant le moins de vagues possible, il s'approcha de sa proie. Et hop, la gueule ouverte au maximum, Crocq passa ses mâchoires dentues sous et au-dessus de l'énorme tortue. Et croc, il les referma avec un grand bruit. "Aie, ouille, oh là-là, ouilleyouyouille" ! Mais quoi? "Mais j'ai mal"! Crocq desserra son étreinte et la tortue, avec une grosse éraflure, sans plus, sur le dos, se sauva aussi vite qu'une énorme tortue peut le faire. Crocq, lui, saignait. Et cette odeur commençait à attirer les autres crocodiles gourmands de sang et de chair fraiche. "Allez vous en" cria Crocq, "c'est pas encore aujourd'hui que vous allez pouvoir me dévorer tout cru"! Et ce faisant deux de ses grandes incisives cassées tombèrent au fond du fleuve et disparurent dans la vase. Mais, pensa-t-il, j'ai perdu deux dents et je n'ai toujours rien à croquer! Faudra-t-il que je ne mange que du mou? Ya-t-il un dentiste dans le monde des alligators?

Le papa de Crocq qui, non loin de là, avait assisté à toute la scène, en souriant, lui dit: "Que cela te serve de leçon. Tu auras mal aux dents pendant quelques jours mais cela passera. En tentant d'ingurgiter cette tortue avec sa carapace, c'est sûr, tu serais mort étouffé. Alors ne te plains pas Crocq, et penses y lors de ta prochaine chasse. Car quand on a les yeux plus grands que le ventre, voilà ce qui arrive!"

 

Baudienville, en souvenir du fleuve Congo, automne 2015.

 

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  • Les Contes du Colvert racontent de belles histoires aux enfants jeunes et moins jeunes que l'on peut leur lire le soir avant de s'endormir car: "Les canards comme les paroles s'envolent. Seul les contes du colvert résistent au temps."
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